Fleurs empoisonnées : le scandale caché des pesticides dans l'industrie florale

Une étude belge révèle la présence inquiétante de plus de 100 résidus de pesticides sur les bouquets de fleurs et sur les mains des fleuristes, ainsi que 70 résidus dans leurs urines. Certaines molécules sont même interdites dans certains pays. Cependant, il est difficile d'identifier le produit à l'origine des pathologies, rendant toute action en justice complexe. Face à cette situation, les experts appellent à une meilleure réglementation et à la mise en place de mesures de protection pour ces professionnels et leurs familles.

Un problème sanitaire majeur qui reste dans l'ombre

### La contamination des fleuristes et de leurs enfantsLes fleuristes sont exposés de manière quotidienne à un cocktail de pesticides lors de la manipulation des fleurs. Une étude belge a ainsi révélé la présence de plus de 100 résidus de pesticides sur les bouquets de fleurs et sur les mains des fleuristes. De plus, 70 résidus de pesticides ont été retrouvés dans leurs urines, y compris des molécules parfois interdites dans certains pays.Cette exposition chronique aux pesticides n'est pas sans conséquence pour la santé de ces professionnels. Certains développent des problèmes respiratoires, des irritations cutanées ou des maux de tête récurrents. Mais le plus préoccupant concerne les enfants des fleuristes, qui subissent les effets de cette contamination dès la grossesse.C'est le cas tragique d'Emmy Marivain, décédée à l'âge de 11 ans d'une leucémie liée à l'exposition aux pesticides. Sa mère, fleuriste près de Nantes, manipulait ces produits chimiques sans le savoir pendant sa grossesse. "Malheureusement, c'est le crime parfait", dénonce son avocat, maître François Lafforgue.### Une impasse judiciaireFace à cette situation, les familles touchées se heurtent à de nombreuses difficultés pour obtenir réparation. Puisque de nombreux pesticides différents sont impliqués, "il est difficile d'identifier le produit à l'origine de la pathologie, et donc difficile d'attaquer un fabricant en particulier", explique l'avocat.Selon lui, "il est absolument impossible d'envisager une action contre tel ou tel fabricant, ce serait voué à l'échec". Cette impasse judiciaire est d'autant plus frustrante que la famille d'Emmy Marivain se bat depuis deux ans pour alerter sur les dangers auxquels s'exposent ces professionnels et leurs enfants.### La nécessité d'une meilleure réglementationFace à cette situation, les experts appellent à une prise de conscience urgente et à la mise en place de mesures concrètes pour protéger les fleuristes et leurs familles. Maître Lafforgue insiste notamment sur la création d'un "registre national pour évaluer l'impact de l'utilisation des pesticides par des professionnels sur leurs enfants".Il est également essentiel de "légiférer véritablement" afin d'encadrer l'utilisation de ces produits chimiques dans l'industrie florale. Les fleuristes et les sociétés du secteur doivent également être mieux informés des risques liés à l'exposition aux pesticides.Seule une action concertée des pouvoirs publics, des professionnels et des associations pourra permettre de mettre fin à ce scandale sanitaire qui reste encore trop souvent dans l'ombre.### La bataille judiciaire de la famille MarivainMalgré ces obstacles, la famille d'Emmy Marivain ne baisse pas les bras. Ils sont actuellement devant la Cour d'appel de Rennes pour tenter d'obtenir une indemnisation "à la hauteur du préjudice immense subi par Emmy de son vivant", explique l'avocat.Cependant, le fonds d'investissement chargé de l'indemnisation "considère que le préjudice de la petite fille ne peut pas être indemnisé". Une situation que dénonce fermement l'avocat : "C'est la solidarité nationale qui doit jouer, mais en l'espèce, la solidarité nationale, le fonds d'indemnisation, ne joue pas son rôle."Cette bataille judiciaire est également un moyen pour la famille Marivain de continuer à alerter l'opinion publique sur les dangers de l'exposition aux pesticides dans l'industrie florale. Un combat qu'ils mènent avec détermination, dans la mémoire d'Emmy et pour que d'autres familles n'aient pas à subir le même drame.