Les Défis des Prévisions Budgétaires en France

Mar 3, 2025 at 4:56 AM
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Dans un contexte économique complexe, le processus de prévision des recettes fiscales en France a récemment connu des difficultés majeures. Les modèles utilisés par les services du Trésor ont conduit à des estimations excessivement optimistes, entraînant des déficits importants. En 2023 et 2024, les prélèvements obligatoires se sont avérés inférieurs aux prévisions initiales, respectivement de 21 et 25 milliards d'euros. Ces écarts ont contribué aux déficits budgétaires record de 5,5 % et 6,1 % du PIB. Des enquêtes parlementaires et des rapports officiels ont mis en lumière les causes de ces erreurs, notamment l'impact de la pandémie de Covid-19, la fragilité des modèles prévisionnels et une certaine influence politique.

La période post-Covid a été marquée par une reprise économique spectaculaire, ce qui a affecté ce que les experts appellent l'"élasticité" des recettes fiscales. Ce rapport entre la croissance des prélèvements obligatoires et celle du PIB a oscillé de manière imprévisible. En 2021 et 2022, il a grimpé à 2 et 1,9, avant de chuter brutalement à 0,42 en 2023. Cette instabilité a rendu les prévisions particulièrement délicates. De plus, les modèles de Bercy n'ont pas anticipé la dégradation des bénéfices des entreprises en 2024, aveuglés par des chiffres exceptionnels comme la forte hausse de la marge d'EDF en 2023. Cet événement a faussé les calculs, bien que cette manne financière n'ait pas été intégrée dans les comptes de l'État.

Le contexte économique global a également joué un rôle crucial. Bien que la croissance ait été relativement satisfaisante en 2023 (+0,9 %), elle n'a pas été pleinement reflétée dans les recettes fiscales. Une grande partie de la production a été exportée, ce qui a profité à la balance commerciale française mais a pesé sur les recettes de TVA. En 2024, la croissance a été moindre que prévu, avec une estimation révisée à 1,1 % au lieu des 1,4 % initialement escomptés. Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques, a souligné que ces erreurs ne devraient pas être uniquement imputées aux fonctionnaires de Bercy, mais plutôt à une certaine "hubris" politique.

Pour améliorer la précision des prévisions, un comité scientifique de haut niveau a recommandé une meilleure transparence et un accès accru aux données. Il suggère que le modèle de prévision soit ouvert aux chercheurs pour qu'ils puissent l'améliorer. Le dialogue avec les grands groupes économiques est également proposé pour mieux suivre les variations des acomptes versés. Pierre Moscovici a même plaidé pour renforcer le rôle du HCFP, lui confiant la validation des prévisions gouvernementales. Cette approche pourrait permettre une meilleure gestion des risques et une plus grande responsabilisation dans le processus budgétaire.

Face à ces défis, il est essentiel de repenser les méthodes de prévision pour assurer une meilleure stabilité financière. La collaboration entre les experts et les décideurs politiques sera cruciale pour élaborer des projections plus fiables. L'introduction de mécanismes de contrôle et de validation externes pourrait également contribuer à une meilleure prise en compte des réalités économiques. Ces ajustements visent à éviter les écarts importants entre les prévisions et les résultats réels, garantissant ainsi une planification budgétaire plus solide et transparente.