Tensions diplomatiques entre l'Algérie et la France : un fossé qui semble se creuser davantage
Les relations entre l'Algérie et la France traversent une nouvelle période de tensions, après les propos très durs tenus par le président algérien Abdelmadjid Tebboune à l'encontre de Paris. Dans une interview télévisée, il a évoqué un "génocide" perpétré par la France durant la colonisation et a rejeté l'idée d'une visite en France, qu'il juge "humiliante". Les deux pays semblent s'éloigner davantage, alors que plusieurs dossiers empoisonnent leurs relations.Un fossé qui semble se creuser davantage entre Alger et Paris
Le rejet d'une visite présidentielle en France
Lors d'un entretien télévisé, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a clairement écarté l'idée d'une visite en France, qu'il considère comme "humiliante" dans le contexte actuel des relations entre les deux pays. Cette visite, sans cesse repoussée depuis mai 2023, était dernièrement prévue entre fin septembre et début octobre 2024. Mais elle semble désormais hypothétique, les relations entre Alger et Paris étant redevenues glaciales après l'annonce fin juillet de l'appui de Paris au plan d'autonomie marocain pour le territoire disputé du Sahara occidental. Suite à cet épisode, Alger a immédiatement rappelé son ambassadeur et réduit sa représentation diplomatique en ne gardant qu'un chargé d'affaires.Le président algérien a utilisé une expression forte pour décrire son refus de se rendre en France, affirmant qu'il "n'irait pas à Canossa", une expression qui signifie aller supplier un pardon. Cette prise de position ferme illustre la dégradation des relations bilatérales et le fossé qui semble se creuser davantage entre les deux pays.Les accusations de "génocide" et de "grand remplacement" pendant la colonisation
Au cours de cet entretien, Abdelmadjid Tebboune est revenu sur la période de la colonisation française en Algérie, de 1830 à 1962. Il a évoqué un "génocide" perpétré par la France, estimant que son pays avait été "choisi pour le grand remplacement, le vrai grand remplacement". Selon lui, cela a consisté à "chasser la population locale pour ramener une population européenne avec des massacres, avec une armée génocidaire".Le président algérien a affirmé que la population algérienne, qui était d'environ quatre millions d'habitants à l'époque, n'était que de neuf millions 132 ans plus tard, ce qui, selon lui, démontre l'ampleur du "génocide" commis par la France. Il a réclamé "la vérité historique" sur cette période, accusant une "minorité haineuse" en France de bloquer toute avancée sur le dossier mémoriel.La question des essais nucléaires français en Algérie
Abdelmadjid Tebboune a également abordé la question des essais nucléaires français menés en Algérie entre 1960 et 1966. Il a lancé un message direct à la France, déclarant : "Vous voulez qu'on soit amis, venez nettoyer les sites des essais nucléaires." Des documents déclassifiés en 2013 ont révélé que ces essais avaient entraîné des retombées radioactives encore importantes, s'étendant de l'Afrique de l'Ouest au sud de l'Europe.Cette demande de la part du président algérien illustre une nouvelle fois les tensions entre les deux pays et la volonté d'Alger d'obtenir des réparations et des gestes concrets de la part de la France pour faire face aux conséquences de cette période coloniale.L'accord franco-algérien de 1968 : un sujet de discorde
Enfin, Abdelmadjid Tebboune a abordé l'accord franco-algérien de 1968, qui octroie un statut particulier aux Algériens en matière de droits de circulation, de séjour et d'emploi en France. Selon lui, cet accord est devenu un "étendard derrière lequel marche l'armée des extrémistes" de droite en France, qui cherchent à l'abroger.En décembre 2023, l'Assemblée nationale française avait rejeté un texte demandant aux autorités françaises de dénoncer cet accord. Cette question illustre une nouvelle fois les tensions entre les deux pays et la volonté de l'Algérie de préserver les acquis de cette période.Dans l'ensemble, les propos du président algérien témoignent d'une détérioration des relations entre Alger et Paris, marquées par des désaccords profonds sur des sujets historiques, mémoriels et géopolitiques. Le fossé semble se creuser davantage, rendant hypothétique une visite prochaine du président algérien en France.