Pourquoi la gauche dépose-t-elle une motion de censure vouée à l'échec ?
Alors que le gouvernement de Michel Barnier fait face à sa première motion de censure, il est clair que cette initiative de la gauche n'a que peu de chances d'aboutir. Avec le soutien annoncé du Rassemblement national, le Premier ministre ne devrait pas être renversé. Mais alors, quel est l'intérêt pour l'opposition de s'engager dans cette bataille perdue d'avance ?Une stratégie politique pour s'affirmer face à l'exécutif
Malgré l'issue prévisible du vote, la gauche a choisi de déposer cette motion de censure. Un choix qui s'inscrit dans une stratégie politique bien précise. Tout d'abord, il s'agit pour l'opposition de se poser en meilleure alternative au gouvernement, en affichant une fermeté et une intransigeance face à l'exécutif. C'est l'occasion pour les différents partis de gauche de resserrer les rangs et de présenter un front uni, même si leurs divergences éclatent par ailleurs sur de nombreux sujets.De plus, cette motion de censure permet à la gauche d'accuser le gouvernement d'être sous l'influence du Rassemblement national. En constatant que le parti d'extrême droite ne soutiendra pas la motion, l'opposition pourra dénoncer les liens entre Michel Barnier et Marine Le Pen, et affirmer que le Premier ministre est "dans la main" du RN.Enfin, cette initiative offre à la gauche une tribune médiatique pour s'adresser à l'opinion publique et se positionner en tant que force d'opposition intraitable. C'est l'occasion de marquer des points auprès de l'électorat de gauche, en se présentant comme les seuls à ne faire aucune concession face à un gouvernement qu'ils jugent illégitime.Une motion de censure, un rituel parlementaire
Au-delà de ces considérations politiques, la motion de censure déposée par la gauche s'inscrit aussi dans un rituel parlementaire bien établi. C'est un exercice classique de l'opposition, qui permet de s'afficher dans un rôle de contre-pouvoir face à l'exécutif.Même si elle est vouée à l'échec, cette initiative a une valeur symbolique forte. Elle montre que la gauche ne baisse pas les bras et continue à s'opposer fermement au gouvernement Barnier. C'est un moyen de maintenir la pression et de ne pas se laisser marginaliser, malgré la faiblesse numérique de l'opposition dans l'hémicycle.Les risques d'une stratégie purement protestataire
Cependant, la répétition de motions de censure vouées à l'échec n'est pas sans danger pour l'opposition. Cela peut en effet finir par renforcer la position du gouvernement, en le confortant dans sa légitimité. De plus, cela risque de confiner la gauche dans une posture purement protestataire, sans véritable alternative à proposer.Surtout, si un jour une motion de censure venait à renverser le gouvernement, le soutien décisif du Rassemblement national pourrait permettre à l'extrême droite de revendiquer ce succès. Une situation qui serait extrêmement délicate pour la gauche, qui devrait alors composer avec un adversaire politique qu'elle a pourtant farouchement combattu.Une motion de censure, un test de la force de l'opposition
Au-delà des calculs politiques, cette motion de censure représente aussi un test pour la gauche. Elle va permettre de mesurer la solidité de l'alliance du Nouveau Front populaire, ainsi que sa capacité à s'unir face à l'exécutif.Le scrutin de ce mardi 8 octobre sera également révélateur de la place de la gauche dans l'hémicycle. Comme lors de l'élection de Yaël Braun-Pivet à la présidence de l'Assemblée nationale, ce vote va montrer que l'opposition est minoritaire face au gouvernement.C'est un signal fort qui risque de fragiliser davantage la position de la gauche. Cela pourrait l'inciter à revoir sa stratégie, en abandonnant une posture purement protestataire au profit d'une opposition plus constructive, capable de proposer de véritables alternatives politiques.