Lors de son audition au Sénat, l'ancien ministre de l'Économie et des Finances, l'Eurois Bruno Le Maire, a réfuté toute "faute" ou "dissimulation" face à l'importante dégradation des finances publiques de la France, renvoyant la responsabilité au gouvernement actuel.
Une explication détaillée des défis budgétaires auxquels la France a été confrontée
Une conjoncture économique et géopolitique difficile
Face à la rapide dégradation de l'environnement économique et géopolitique début 2024, entraînant un abaissement de 1,4% à 1,1% de la prévision de croissance, Bercy a réagi en annulant 10 milliards d'euros de crédit dès février. Cependant, l'ex-ministre a regretté d'avoir échoué à convaincre au sein de l'exécutif de la nécessité d'un projet de loi de finances rectificative au printemps pour 15 milliards. Il a souligné que cette décision a été prise de manière solidaire, malgré les défis budgétaires auxquels la France a été confrontée.Des recettes fiscales inférieures aux prévisions
Selon Bruno Le Maire, la mauvaise santé des finances françaises, qui rangent la deuxième économie de la zone euro parmi les mauvais élèves européens, s'explique par les soutiens massifs déployés durant les crises successives, et plus récemment par des recettes fiscales bien moindres que prévu. Il a indiqué que les recettes sont de 41,5 milliards d'euros inférieures aux prévisions, soulignant qu'il n'y a eu "ni faute, ni dissimulation, ni volonté de tromper", mais plutôt "une grave erreur technique d'évaluation des recettes".Une "étanchéité totale" pour éviter tout risque de manipulation
Bruno Le Maire a insisté sur le fait que "jamais, à aucun moment, ni le cabinet, ni a fortiori le ministre ne disent un mot sur l'évaluation des recettes": il y a "une étanchéité totale" afin d'éviter un risque de "manipulation". Il a ainsi rejeté les accusations de dissimulation portées contre lui, affirmant que la responsabilité incombe au gouvernement actuel.Un déficit public en forte hausse
Le déficit public devrait atteindre 6,1% du PIB en 2024, contre 4,4% prévu à l'automne 2023 puis 5,1% au printemps par le gouvernement précédent. Bruno Le Maire a expliqué que si les mesures préparées avec son ancien collègue Thomas Cazenave avaient été mises en œuvre sans délai par le nouveau gouvernement, couplées à des mesures de recettes sur les rentes énergétiques et les rachats d'actions, le déficit aurait pu être contenu à 5,5% sans augmentation d'impôts.Une "espèce de feu d'artifice d'autosatisfaction collective et solidaire"
Le rapporteur général du budget Jean-François Husson (LR) a critiqué ce qu'il a qualifié d'"espèce de feu d'artifice d'autosatisfaction collective et solidaire" sur l'action de l'ancien ministre, rappelant que Bruno Le Maire était encore en poste début septembre. Il a souligné que cette "autosatisfaction" se paie "au prix fort d'une dette colossale et abyssale".Des questionnements sur la fiabilité des prévisions
Le dérapage inopiné du déficit, après celui déjà observé en 2023, a suscité des questionnements sur la fiabilité des prévisions de la précédente majorité macroniste. Le sénateur Jean-François Husson a ironisé sur le fait que ce n'est plus une "tempête parfaite, exceptionnelle", mais plutôt "un ouragan de longue durée".Une série d'auditions au Sénat
Après l'audition de Bruno Le Maire, le Sénat entendra Thomas Cazenave dans l'après-midi, puis l'ex-Premier ministre Gabriel Attal vendredi 8 novembre et sa prédécesseure Élisabeth Borne le 15 novembre 2024, avant l'examen du projet de budget 2025 dans les prochains jours en chambre haute, où la majorité sénatoriale, une alliance LR-centristes, a basculé dans le "socle commun".