Dans le contexte politique complexe du Liban, la désignation du Premier ministre Nawaf Salam a mis en lumière une controverse majeure concernant l'attribution du ministère des Finances. Malgré les appels internationaux pour une formation rapide du gouvernement, Salam se heurte à l'opposition du duo chiite Amal-Hezbollah, qui insiste pour conserver ce poste clé. Cette situation soulève des questions sur l'interprétation de l'accord de Taëf et la Constitution libanaise, mettant en jeu les équilibres communautaires au sein du gouvernement.
Depuis sa nomination, Nawaf Salam a affirmé son engagement à respecter les dispositions constitutionnelles et l'accord de Taëf lors de la formation du gouvernement. Cependant, il fait face à une résistance significative de la part des forces politiques chiites, notamment Amal et Hezbollah, qui revendiquent le contrôle du ministère des Finances. Ce portefeuille, traditionnellement occupé par un représentant de la communauté chiite depuis plus d'une décennie, est devenu le point central d'un bras de fer politique.
Le président de la Chambre, Nabih Berry, a soutenu cette position en invoquant l'accord de Taëf, affirmant que ce document attribue spécifiquement ce poste à la communauté chiite. Toutefois, l'ancien député Boutros Harb a contesté cet argument, expliquant que l'accord n'a jamais consacré une attribution exclusive de ce ministère à une communauté particulière. Selon lui, l'objectif était plutôt de promouvoir la rotation des postes pour éviter les monopoles.
Les experts constitutionnels comme Paul Morcos soulignent que la Constitution amendée en 1990 ne réserve aucun ministère à une communauté spécifique. L'équité dans la représentation communautaire reste le principe directeur, sans aucune disposition formelle attribuant le ministère des Finances à une seule communauté. Cette interprétation est corroborée par l'historique des nominations, où ce poste a été occupé par des représentants de diverses communautés religieuses.
Cette controverse révèle la complexité des arrangements politiques au Liban, où chaque communauté cherche à maintenir son influence. La demande du duo chiite de conserver le ministère des Finances s'inscrit dans une stratégie plus large visant à garantir une place prépondérante au sein du système gouvernemental. Cela soulève également des inquiétudes quant à l'avenir des équilibres institutionnels, notamment la parité islamo-chrétienne.
Face à ces défis, certains observateurs suggèrent que le moment est venu de repenser les mécanismes de gouvernance actuels. Plutôt que de chercher à modifier la Constitution, ils proposent de mettre en œuvre les principes déjà en vigueur, afin de favoriser une représentation plus juste et équitable de toutes les communautés. Cette approche pourrait contribuer à renforcer la stabilité politique et économique du pays, tout en respectant les engagements nationaux et internationaux.