Fleurs empoisonnées : le combat d'une mère pour la vérité
Après le décès de sa fille Emmy, une ancienne fleuriste a entamé un combat judiciaire pour faire reconnaître le lien entre l'exposition aux pesticides et le cancer qui a emporté l'enfant. Une bataille qui met en lumière les risques méconnus de cette profession.Une lutte pour la justice et la transparence
Une reconnaissance du lien avec les pesticides
Originaire des Pays de la Loire, Laure Marivain a exercé le métier de fleuriste de 2004 à 2011. Après le décès de sa fille Emmy, emportée par un cancer à l'âge de 11 ans, le Fonds d'indemnisation des victimes de pesticides (FIVP) a reconnu "le lien de causalité entre la pathologie [d'Emmy] et son exposition aux pesticides durant la période prénatale". Une décision rare, le FIVP examinant habituellement les cas de cancer chez les agriculteurs.Un empoisonnement invisible
Laure Marivain a "consommé des pesticides" sans le savoir, lors de la réception, de la manipulation et de la livraison des fleurs traitées. "Rien n'était visible sur mes mains", déplore-t-elle, avant d'ajouter : "on peut parler d'empoisonnement." Une étude belge menée en 2019 auprès de fleuristes a d'ailleurs détecté des résidus de pesticides sur leurs mains et dans leurs urines, démontrant que ces substances pénètrent l'organisme lors de la manipulation des fleurs.Un combat pour la vérité
Avant de mourir, Emmy a fait promettre à sa mère de se battre pour que "tout le monde sache la vérité". Une promesse que Laure Marivain honore aujourd'hui devant la justice, réclamant une indemnisation à la hauteur du "calvaire enduré" par sa famille. "Si on est capable de comprendre cela à 11 ans, que font les adultes qui sont censés nous protéger ?", s'indigne-t-elle.Des cas de fleuristes victimes des pesticides
Laure Marivain n'est malheureusement pas la seule fleuriste à avoir été confrontée aux conséquences des pesticides. Son avocat, François Lafforgue, a obtenu la reconnaissance en maladie professionnelle pour deux autres cas de fleuristes décédées d'un lymphome non hodgkinien.Un manque d'information dans la profession
Malgré ces cas avérés, la profession dispose de peu d'information sur les risques liés à l'exposition aux pesticides. "Quel professionnel de la fleur a conscience d'être empoisonné tous les jours à petit feu ?", s'interroge Laure Marivain. Un constat partagé par Jean-Michel, propriétaire d'une boutique de fleurs à Rennes, qui jusqu'ici se montrait davantage préoccupé par l'impact environnemental de la production florale que par les conséquences sur sa santé.Des pesticides omniprésents dans les fleurs
Une étude publiée en 2021 a identifié l'utilisation de plus de 200 pesticides pour la production ou la conservation des fleurs, dont 93 sont interdits par l'Union Européenne. Des tests menés en 2017 sur des roses commercialisées en France ont également révélé la présence de quinze substances en moyenne par bouquet. Pourtant, il n'existe à ce jour aucune réglementation sur la présence de pesticides dans les fleurs.Une indemnisation insuffisante
Malgré la reconnaissance du lien entre le décès d'Emmy et l'exposition aux pesticides, Laure Marivain refuse l'indemnisation de 25 000 euros proposée par le FIVP. Elle réclame devant la justice une somme plus représentative du "calvaire enduré" par sa famille. Le jugement a été mis en délibéré au 4 décembre 2024.